Je suis convaincue que c’est plus difficile pour une femme de faire carrière que pour un homme, car en cas d’échec, le prix à payer est plus élevé. Dans ce film, je voulais raconter l’histoire d’une femme qui suit sa voix intérieure depuis son enfance. Depuis toute petite, cette femme sent bien qu’elle va devoir sortir de la norme. Pour suivre sa vocation, les prémices de cette volonté se révèlent dès son plus jeune âge, déjà à l’école cette femme n’est pas une petite fille comme les autres. Par la suite, chaque fois qu’elle fait ses propres choix, ses comportements sont jugés par les personnes qu’elles croisent sur son chemin. Quant aux obstacles à sa carrière, ils ne se situent pas seulement autour de la maternité, mais à chaque fois qu’elle opte pour un autre chemin. La confiance de son entourage s’avère alors primordial pour qu’elle se sente soutenue tout au long de son parcours. En conclusion, je voulais mettre l’accent sur l’importance de faire évoluer les mentalités pour que plus de femmes osent sortir de la norme.

Trajectoire

L’approche traditionnelle de la gestion de la mixité en entreprise se concentre sur l’aménagement du temps de travail afin de permettre aux femmes de travailler à temps partiel. Cette stratégie réduit la mixité à une affaire de maternité. Les enjeux sont plus complexes. Les recherches montrent que les freins aux carrières féminines sont multiples et de longue durée. Les femmes qui ont réussi à briser le plafond de verre ont très souvent dû faire face à des résistances dès leur plus jeune âge. En ce sens, naître fille ou garçon ne vous offre pas les mêmes chances. Les parents, l’école et le conjoint ont autant d’impact sur ces trajectoires de femmes que leur premier enfant. En définitive, une femme qui ose sortir du chemin que la société a tracé pour elle, devra affronter de nombreux défis.

Pression du groupe

La pression sociale est forte tout au long de la scolarité. Filles et garçons vont chercher à se faire accepter par le groupe en adoptant ses codes. Ces comportements deviennent très flagrants à l’adolescence mais ils commencent déjà tout petit. Ces clichés sont souvent renforcés par l’attitude des parents. Ils craignent pour leurs enfants si ceux-ci ne se comportent pas selon la norme. Un garçon qui décide de devenir danseur de ballet sera pointé du doigt. Une fille qui joue au foot devient un garçon manqué… Cette pression sociale se poursuit à l’adolescence et dans la vie adulte. L’être humain a toujours recherché le contact avec l’autre pour combler sa solitude. Nous sommes donc prêts à renoncer à nos rêves et à rentrer dans le rang par crainte d’être mis de côté.

Héritage

L’héritage familial joue un rôle important. Dans le film de ce chapitre, c’est le père de la jeune fille qui va dédramatiser la situation et l’encourager à poursuivre dans ce qu’elle aime faire. Les femmes qui se réalisent professionnellement ont très souvent une figure dans leur entourage qui leur donne du courage et de la confiance. Cela peut être une mère qui reprend des études en cours du soir après son divorce. Ou un grand-père qui encourage sa petite-fille à persévérer dans sa voie malgré la réticence de ses parents. L’héritage familial est une source d’inspiration et un ancrage solide sur lesquelles pourront s’appuyer filles et garçons, à conditions qu’ils apprennent à s’écouter et qu’ils tracent leur propre chemin.

Conjoint

Le choix du conjoint est également déterminant. Le prince charmant qui résout tous les problèmes est un mythe. Il n’y a pas de potion magique pour réussir un mariage. Les couples qui tiennent sont ceux qui communiquent sur leurs besoins. Cette communication demande une bonne capacité d’écoute et une ouverture aux solutions nouvelles. Très souvent, un des deux conjoints (l’homme plus souvent que la femme) réalise son projet professionnel parce que l’autre a accepté de mettre sa vie professionnelle entre parenthèse. À contrario, quand lui et elle font carrière, leurs chemins se sépareront tôt ou tard. Mettre les choses sur la table et communiquer permettra de s’adapter à ces nouvelles situations. Entre 20 et 30 ans, au moment de choisir un conjoint, il est utile de se demander si l’autre va pouvoir vous soutenir dans les moments-clés de votre carrière.

Puberté

La période de l’adolescence des enfants est une étape charnière dans la carrière d’une femme. La puberté est le moment où les enfants cherchent leur identité d’adulte. Ils franchissent les limites pour découvrir le monde. Ces expériences de vie sont parfois destructrices et risquées. De nombreuses mères culpabilisent quand leurs enfants atteignent l’adolescence. Elles ont le sentiment que les difficultés rencontrées sont dues à leur absence du foyer familial. La pression sociale renforce cette culpabilité puisque c’est avant tout la mère qui est stigmatisée si ses enfants font des bêtises.

Naissance

Avant même que l’enfant ne voit le jour, ses parents ont déjà projeté sur lui une trajectoire idéale. Impatients de voir arriver leur descendance, les parents ne résistent souvent pas à connaître le sexe de leur enfant avant sa naissance. Ils pourront ainsi préciser leurs préparatifs et affiner leurs projections. La chambre sera repeinte en rose ou en bleu… Ce conditionnement des trajectoires de vie commence donc très tôt. Il est renforcé par notre société de consommation où tout s’achète désormais en garçon ou en fille: couche-culotte, vêtements et jouets. C’est donc souvent avec les meilleures intentions du monde que nous enfermons nos enfants dans des voies qui ne leur correspondent peut-être pas.

Éducation

À l’école, une institution pétrie de traditions, l’accompagnement des filles et des garçons est basée sur nos représentations de leurs rôles respectifs en société. Se regardant dans le miroir de nos attentes, les filles se rêvent coiffeuse, vendeuse ou maîtresse d’école. Les garçons pilote, policier ou pompier. Du point de vue scolaire, filles et garçons obtiennent les mêmes scores jusqu’à l’âge de 12 ans. Entre 12 et 15 ans, les chercheurs ont montré que les garçons prennent de l’avance, surtout dans les voies scientifiques. C’est aussi le début de l’adolescence, quand l’importance du regard des autres prend de l’ampleur. Adopter les codes du groupe devient une question de survie. Commencent aussi les premiers jeux de séduction. Les filles s’y intéressent avant les garçons. C’est aussi l’âge des premiers choix professionnels. Oser suivre une voie atypique, implique donc pour une fille de surmonter la pression du groupe et de dépasser son rôle de séductrice.

Conjoint

Dans le film de ce chapitre, la jeune ingénieure sort en boîte de nuit, comme toutes les femmes de son âge. Elle a envie d’exercer le métier de ses rêves sans renoncer à trouver l’homme de sa vie. Or on constate que les femmes leaders sont beaucoup plus seules que les hommes leader. Au moment des jeux de séduction, la fille «un peu différente» créera un vide autour d’elle. A l’inverse, la fille qui tient son rôle de séductrice, intéressera du coup tous les garçons. Dans l’imaginaire collectif, une femme qui ose tracer son propre chemin le fera aux dépens de sa vie intime. De nombreux hommes ont encore peur des femmes qui prennent en main leur avenir et font carrière. Ces femmes indépendantes ont souvent de la peine à trouver un homme qui l’accepte comme elle est, qui aime son originalité et qui n’est pas jaloux de ses responsabilités et de son salaire plus élevé.

Publicité

Les publicitaires ont aussi une part de responsabilité dans ce carcan social qui empêche les femmes de s’épanouir au travail. Dans certains secteurs, où la tradition et le patrimoine sont des valeurs fortes, la figure du père est souvent représentée en train de transmettre son savoir-faire à son fils. Il devient ainsi un mentor qui trace le chemin pour son héritier. Les mères apprennent à leurs filles l’esthétique et la pureté. Là, la transmission du savoir-faire s’arrête donc à la beauté et à l’apparence.

Confiance

Le langage et les mots que nous utilisons avec nos enfants auront une grande influence sur leur confiance en soi. Cette interaction commence dès la grossesse, avant même de nous voir, ils ressentent nos joies et nos peurs. Le choix des mots et le ton que nous utilisons avec eux sont donc des éléments fondamentaux de la confiance et de l’autonomie qu’ils auront par la suite. Ce chemin n’est pourtant pas aisé. À trop vouloir les réconforter, nous risquons de les surprotéger. À trop les abandonner à eux-mêmes, ils pourraient interpréter cette distance comme un manque d’amour. Le mot-clé est la confiance. C’est grâce à elle que nos enfants, filles et garçons, pourront tracer leur propre chemin.

Droit à l’échec

L’échec est peu valorisé dans le système scolaire. Le premier de classe est celui qui réussit et qui obtient la meilleure moyenne. Les notes donnent une fausse idée de la réussite. Car celui qui réussit sa vie est avant tout celui qui se connaît et qui suit son propre chemin. De plus, les échecs sont parfois plus riches en apprentissages que les réussites. À une jeune fille qui désire mener une carrière d’«homme» nous aurons tendance à la mettre en garde car le chemin sera truffé d’embûches. Pourquoi ne pas leur accorder le droit de tenter l’aventure, quitte à subir des échecs? À tellement vouloir les protéger nous brisons leur esprit d’initiative.

Yes we can

Tout est possible! C’est uniquement parce que nous croyons que cela va être difficile que cela le devient. Très souvent, quand une jeune fille annonce son désir de choisir une voie atypique pour son genre, nous lui disons qu’elle devra être deux fois meilleure qu’un garçon pour réussir. Certes, le chemin à parcourir sera semé d’embûches. Toutefois à force d’insister sur ces difficultés, nous leur rendons la tâche insurmontable. L’entourage des filles devrait au contraire leur montrer que tout est possible. Au lieu d’insister sur les obstacles et le côté superwoman de la tâche, nous devrions les soutenir avec un esprit positif et en étant réellement convaincu de leur succès futur.

Pionnière

Certaines femmes ressentent très tôt l’envie de devenir des leaders. Elles ont la vocation et cultivent leur légende personnelle depuis l’enfance. Mais ces vocations sont rares. Quand une femme choisit un chemin de pionnière, elle doit accepter une certaine solitude. Quand vous défrichez le terrain, vous prenez parfois des branches dans la figure. Les premières femmes à avoir menées des vies d’hommes ont toutes eu des caractères bien trempés. Quand vous êtes pionnières, il faut accepter les critiques et la solitude et suivre son instinct. Et derrière chaque femme qui ose affronter ces obstacles, il y en a 50 autres qui pourront peut-être faire de même.

Mentorat

Raconter son histoire et témoigner des épreuves traversées avec authenticité peut aider les autres à franchir le pas. Une femme qui réalise son destin malgré les difficultés a le devoir de transmettre son vécu et son ressenti aux autres femmes de son entourage. Ces témoignages donnent du courage et de la confiance à celles qui démarrent dans leur carrière. Le mentorat est aussi un endroit où l’on peut confier ses difficultés sans crainte. Entendre les témoignages des pionnières qui sont déjà passé par là est extrêmement rassurant et positif. Et le mentorat apporte une plus-value autant à celle qui cherche à être rassurée qu’à celle qui sait désormais que son expérience a été utile à quelqu’un.

Elsa, nouvellement nommée à un poste de direction générale, se remémore sous forme de flashbacks les moments clés de son parcours professionnel, de la petite fille à la femme, mère de famille, et dirigeante d’une grande entreprise de télécommunication.

Vient du grec, qui diffère du type habituel, hors du commun, qui est inclassable.

Vous reconnaissez-vous dans cette histoire? Avez-vous une anecdote à ce sujet à raconter ?

Qui sont les femmes de votre entourage qui pourraient inspirer vos filles à oser une carrière professionnelle atypique au point de vue du genre?

Quelles leçons vos enfants pourront-ils tirer de leurs échecs scolaires et professionnels?

Comment, selon -vous, faire évoluer les mentalités concernant les métiers dits "pour les filles ou pour les garçons" dans la société ?